Freddy Makanda: amputé de ses deux jambes, gagne sa vie par des spectacles à Goma.

Ancien boxeur, Freddy Makanda se voue dans l’acrobatie et des spectacles sportifs dans les rues de Goma. C’est une façon qu’il a adoptée depuis que ses deux jambes ont été amputées par l’explosion d’une mine. Il s’est fait déjà un public, de cette maniéré, il gagne sa vie. Il nous a accordé une interview.
Emergence Plus : pourquoi produisez-vous seul dans les rues de Goma?
Freddy   Makanda : parce que je suis un homme remplie des devoirs et obligations familiaux. Je me dois de donner des spectacles en rue pour vivre sans dépendance.  je suis sportif, travailleur même si en chômage et artiste d’esprit. J’estime que je peux suer en gagnant  ma vie car j’ai toujours travaillé pour gagner mon pain quotidien. Comme j’avais travaillé avant mon accident pour la Fédération internationale de la Croix rouge(FICR) où je gagnais ma vie dans la dignité. Malgré mon Handicape, j’ai l’impression de rester la même personne.
Emergence Plus : Comment gagnes-tu ta vie ?
Freddy Makanda        : je gagne ma vie en donnant du spectacle aux passants. J’interprète sans instrument la musique congolaise, surtout celle de Werrason et de Defao Matumona. Les mélomanes s’approchent de moi. Pendant ce temps, j’enlève mes prothèses et je m’appuie  sur mes cannes pour danser. Convaincus, ils  collectent pour moi quelques billets de banque. Tout simplement,  le prix n’est pas fixe.  Car certains me remettent 100 à 1000FC selon leur bien vouloir. Par jour, je peux réaliser   au-delà de 10 dollars.
Emergence Plus            : que faites-vous concrètement pour émerveiller  vos admirateurs?
Freddy   Makanda                : je fais des numéros, ne lésinant pas sur le spectacle, je surgie souvent en équilibre sur une moto, à l’envers, tête posée sur la selle. Où je marche tête en bas, marchant sur mes mains et les restes de mes membres inferieurs en l’air. Souvent je le fais dans le marché de Virunga et aux alentours de parking bus,  à Tora Tigna ou sur les lieux publics pendant les heures de pointe. Là mes spectateurs, me mettent en honneur avec des cris d’encouragement et de satisfaction. Du coup, ils n’hésitent pas de me glisser quelques billets de banques dans la poche. Pour la boxe, je me réchauffe en faisant le pompage sur le sol sous l’aie  vigilant des miens. Pour les émerveiller, j’enlève mes prothèses puis je fais quelques exhibitions: de kiperckit, Aéro-kick, appât, arme, des crochets, balayage, kick boxing, blocage… De fois  j’improvise en appelant un volontaire passant, bien battu physiquement de m’attaquer par les coups de point. Cependant, je ne réplique pas ex cuvant tout de même ou barrant  ses coups. Emballés de joie, tous les spectateurs  m’applaudissent, en me motivant  par de cris tels que, « Ya Freddy mutu ya makasi« , qui veut dire, grand Freddy, le plus fort, ndlr ».
Emergence Plus                 : Comment as-tu appris cet art ?
Freddy  Makanda       : je fais la boxe et le Judoka depuis 25 ans. J’ai commencé à apprendre ces sports  à Bukavu quand j’étais encore élève au collège Alphadjiri dans le club commando avant de devenir infirme. Pour moi, le handicap n’est pas une fatalité. Comme tout Africain, la musique coule dans mon sang et je n’ai pas de difficulté pour l’apprendre car j’en suis un grand fan depuis l’enfance. J’ai développé cela en assistant souvent à la répétition de la FINANCIA ESTETICA, un orchestre jadis composé par les étudiants ici à Goma.
Avant cet avènement, j’ai été choriste dans mon église où je chantais  depuis mon enfance. Je me contente de tourner en ville, proposé aux passants des numéros d’acrobatie et je gagne ainsi de quoi nourrir  mes six enfants. Ceci juste pour éviter de quémander et de donner leçon autres handicapés que nous devons nous débrouiller autrement. Je me suis décidé de développer mon sport et grâce à mon spectacle je collecte à peu près 12000 FC, soit 10$ par jour et je ne me plaints pas. S’il faut faire un calcul final, je peux gagner au-delà de 300 $ par mois.
Emergence Plus               : Que pensez-vous des handicapés qui  mendient dans les rues de Goma?
Freddy Makanda               : se retrouver dans les rues en train de quémander nous rabaisse. Je pense que celui qui a une capacité de faire quelque chose  pour  subvenir à ses besoins, il n’a qu’à le faire. S’il n’en a pas le moyen, il peut apprendre un métier comme les cordonniers, les tailleurs, les pousse-pousseurs  qui traversent la frontière Rwando-Congolaise en quête du pain quotidien. Seul le travail peut nous rendre indépendant et donner de la valeur  envers nos concitoyens. Aussi l’Etat Congolais doit prendre ses responsabilités en encourageant les projets initiés par des personnes vivant avec handicap. Aujourd’hui,  les conditions pour faire passer de petits colis à la petite barrière sont devenues de plus en plus difficiles. Pourtant, c’était le seul moyen pour encourager le handicapé  de vivre dans l’indépendance.
Emergence Plus                  : est ce qu’il vous arrive d’avoir des rêves pour un grand sportif à l’échelle mondiale?
Freddy   Makanda              : oui, je suis ambitieux  par exemple participer à des compétitions olympiques si je trouve un manager et un entraineur.  J’aimerai que les handicapés exploitent leurs capacités dans le sport. Si les personnes de bonne volonté pouvaient nous aider. Nous sommes capables d’apporter un plus pour l’avancée de ce pays. Ce qui nous manque c’est l’appui, mais les idées sont là.
Emergence Plus    : pouvez- vous, nous  raconte votre histoire d’handicap ?
Freddy Makanda : je n’aime pas le dire car ce qui est arrivé, est arrivé! ça fait vingt ans depuis que j’ai perdu mes deux jambes depuis 1996. Le  minibus à bord  du quel j’étais en partance pour le territoire de Masisi avait roulé sur une mine. Tous les passagers étaient  morts. J’ai survécu seul miraculeusement amputé de deux jambes.  J’avais eu alors une généreuse,  la défunte fondatrice de l’hôpital  Heal Africa, Line Lusi. Elle  me rapportant ces prothèses de son retour des USA. Par mon courage, je suis allé un jour la demander du travail. Je lui ai dit que j’étais sportif et  j’ai  eu assuré sa garde du corps   étant handicapé avec mes cannes anglaises. Elle n’est plus de ce monde, je déplore sa mort et que son âme repose en paix. Aujourd’hui mon accident m’a fait prendre conscience de la dangerosité des engins explosifs. Il est temps que  les fabriquant et les utilisateurs de ces engins  reconnaissent  les morts et les handicaps  qu’ils  causent impliquant  des innocents. Dieu n’a pas créé ce monde avec  des mines…
 Propos recueilli  Norbert Mwindulwa

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